Dans tous les métiers à tisser on désigne sous le nom de chaîne les fils qui se trouvent disposés dans le sens de la longueur de l’étoffe. Cette chaîne dont le nombre de fils varie suivant le genre de tissu est pliée (enroulée) sur un gros cylindre de bois appelé rouleau de chaîne ou ensouple, lequel se place sur deux supports fixés contre les pieds arrière du métier. En se déroulant du rouleau arrière la chaîne est étendue dans toute la longueur du métier et l’intervalle compris entre le rouleau de chaîne où se trouvent passés les fils prend le nom de longueur. Dans la longueur, tous les fils sont envergés, c’est-à-dire entrecroisés sur deux baguettes plates ou rondes en bois poli, appelées verges ou cannes, cette encroisure se faisant de la manière suivante : les fils impairs sont passés au-dessus de la première canne et au-dessous de la seconde, les fils pairs étant passés inversement au-dessous de la première et au-dessus de la seconde, la première canne étant naturellement celle qui se trouve en arrière, la plus rapprochée du rouleau de chaîne
L’encroisure des fils de la chaîne sur les cannes a pour but :
- de conserver aux fils la place qui leur a été donnée à l’ourdissage- de permettre au tisseur de retrouver facilement l’emplacement d’un fil cassé pendant le tissage- de supprimer les tenues provoquées par les fils qui, dans l’ourdissage à bras en particulier, se trouvent groupés par musette.
Dans certains cas, lorsque les fils de la chaîne sont très nombreux et serrés il peut être utile de les disposer sur deux paires de cannes par 2 fils envergés à la première paire située dessous et 2 fils envergés à la deuxième paire située au-dessus. Ce genre d’envergure est désigné sous le nom de double envergure.
Dans d’autres cas il est nécessaire aussi de placer une canne supplémentaire appelée contre-verge dont le but est de détacher les tenues qui peuvent se former en avant des verges c’est-à-dire derrière le corps de remisse.
La chaîne, tout en se déroulant du rouleau arrière, est maintenue tendue par des organes dont le dispositif est très variable qui sont disposés sous le nom de bascules, d’une manière générale.
Pour produire le tissu il faut actionner les fils et les faire passer alternativement soit au-dessus de la trame, soit au-dessous. On utilise pour cela des appareils spéciaux qui sont des lisses pour les étoffes unies ou armurées, des maillons pour les étoffes façonnées.
Les fils sont passés d’après un ordre déterminé en rapport avec le nombre de fils et le genre de tissu à produire. Ces lisses ou ces maillons, dont l’ensemble forme le corps de remisse ou le corps de maillons, sont placés en avant du métier à environ 60 cm des pieds, leur mouvement est donné par des organes spéciaux qui prennent le nom de mouvement de taffetas, de mécanique d’armure, de ratière, de mécanique de façonné.
En avant du corps de remisse ou du corps de maillons, tous les fils traversent le peigne formé par des lames d’acier entre lesquelles se trouvent disposés les fils. Ce peigne est monté sur le battant qui l’entraîne dans un mouvement de recul qui est provoqué par l’ouvrier soit automatiquement à l’aide d’un marcheur, soit avec la main. Le rôle du peigne dans les métiers à tisser est triple :
distribuer régulièrement tous les fils dans la largeur que doit avoir le tissuservir de guide à la navette dans son parcours à travers les filstasser la trame pour former l’étoffeL’intervalle existant entre le corps de remisse ou de maillons et la partie tissée est désigné sous le nom médée, espace dans lequel se déplace le peigne entraîné par le battant.
L’étoffe tissée s’enroule sur un rouleau placé en avant du métier et qui prend le nom de rouleau d’étoffe. Cet enroulement du tissu qui doit se faire régulièrement au fur et à mesure du tissage est guidé par un appareil appelé régulateur qui, par une série de pignons et de roues dentées, commande le rouleau d’étoffe.
Le régulateur des métier à bras est fixé contre le pied avant droit du métier et repose sur la banque. Le rouleau d’étoffe est donc supporté du coté droit par le régulateur et il est maintenu du coté gauche par un support appelé patte qui est fixé contre le pied avant gauche du métier.
L’étoffe non enroulée qui se trouve en avant du peigne est appelé façure et dans certains cas on dispose d’un rouleau à faible diamètre porté à ses deux extrémités par des supports fixés généralement sur les banques. Ce petit rouleau appelé rouleau de façure maintient continuellement la façure à une hauteur constante, quelque soit la quantité d’étoffe tissée. Dans certains tissus, tel le velours, l'étoffe ne peut pas être enroulée sous tension, elle est alors entraînée par un rouleau dont la périphérie est émerisée et armée de petites aiguilles disposées selon un certain ordre et désigné sous le nom de rouleau piqué et émerisé. L’étoffe enveloppe les ¾ de la circonférence du rouleau puis se plie au-dessous dans une caisse ou s’enroule sur un petit rouleau sous tension, placé au-dessous des banques.
Cette disposition est générale, quelque soit le système du métier et le genre d’étoffe à exécuter.
Les deux pieds de derrière sont reliés solidement à leur base par une traverse assemblée et boulonnée qui prend le nom de claire. Les deux pieds de devant sont renforcés à leur partie inférieure jusqu'à une hauteur d'environ 70 cm, sur cette partie repose un plateau en bois dur désigné sous le nom de banque, après lequel se fixe différents organes qui varient suivant l'organisation du métier.
Sur la banque et en avant de chaque pied se trouve le caissetin, petite boite qui sert à l'ouvrier pour déposer les canettes, etc… et qui est recouvert d'ordinaire par une petite planchette. Contre et à l'intérieur des 2 pieds de devant et à environ 50 cm du sol, se fixent souvent 2 supports mobiles et réglables appelés oreillons qui ont pour but de supporter la banquette sue laquelle s'appuie l'ouvrier dans le tissage de certaines catégories d'étoffes.
Tous les bâtis de métier, malgré qu'ils soient toujours composés de la même manière ne sont pas construits aussi solidement que celui représenté par les fig. 1 et 2. Ce métier était autrefois beaucoup employé à Lyon où se tissent les belles et fortes étoffes demandant pour leur bonne exécution un bâti très fort et bien assemblé, ne vibrant pas pendant la marche du métier.
Il n’est pas indispensable pour faire une bonne étoffe d’avoir un métier très bien construit et ayant belle apparence, il suffit simplement que les pièces de bois soient assez fortes, convenablement assemblées pour recevoir l’organisation qui est demandée pour le genre de tissu à exécuter.
Bâti d'un métier
On appelle bâti la charpente de bois sur laquelle se trouve placés ou fixés tous les organes du métier. Cette charpente, dans les métiers à bras, est composée de 9 grosses pièces de bois équarries et dressées, et réunies à l'aide de tenons pris dans des mortaises et fixés avec des boulons d'assemblage.
Quatre de ces parties de bois placées verticalement et mesurant généralement 1m 80 à 1m 90 sont désignées sous le nom de pieds de métier. A leur extrémité, ces 4 pieds sont reliés par 4 traverses qui fixent l'écartement des pieds à leur partie supérieure. Deux de ces traverses appelées estases relient deux par deux les pieds avant du métier et les pieds correspondant placés en arrière déterminent la longueur du métier. Cette longueur peut varier suivant l'emplacement dont on dispose et le genre de tissu que l'ont doit exécuter, en général cette longueur est comprise entre 2 m et 2 m 50, et se mesure entre les pieds de devant et de derrière.
A leur extrémité les estases sont reliées par deux fortes traverses appelées clefs qui déterminent la largeur du métier. Cette largeur varie et dépend surtout de la largeur de l'étoffe à exécuter, elle doit être pour le métier d'au moins 30 cm plus grande que celle du tissu. Cette mesure étant également prise à l'intérieur des pieds.
On construit des métiers mesurant depuis 1 m de large jusqu'à 3 m et plus.
Cours de tissage pratique
Ecole municipale de tissage de LyonProfesseur A.CREPT - Année 1912-1913
Le cours manuscrit a été recopié par nos soins.Ce cours de tissage sur métiers lyonnais à bras a été utilisé jusque dans les années 1980.